La maîtrise du risque explosion dans l’industrie agroalimentaire

Quand on pense aux risques industriels, l’explosion évoque souvent les raffineries, la chimie ou la pétrochimie. Pourtant, l’industrie agroalimentaire est elle aussi concernée, notamment par le risque d’explosion de poussières. Farine, sucre, amidon, lait en poudre… autant de produits anodins en apparence, mais qui peuvent devenir redoutablement inflammables en suspension dans l’air.

La maîtrise du risque explosion dans l’industrie agroalimentaire

La maîtrise de ce risque, souvent sous-estimé, est un enjeu majeur pour la sécurité des salariés, la pérennité des installations et la conformité réglementaire. Cet article propose un tour d’horizon des causes, des obligations et des bonnes pratiques liées au risque ATEX (atmosphères explosives) dans le secteur agroalimentaire.


I. Comprendre le risque d’explosion dans l’agroalimentaire


A. La poussière : un combustible méconnu mais redoutable

Dans certaines conditions, des poussières d’origine alimentaire peuvent devenir explosives :

  • Taille de particules très fine
  • Grande surface de contact avec l’air
  • Présence d’une source d’ignition (étincelle, chaleur, friction)
  • Confinement dans une cuve, un silo, une gaine ou un local fermé

Des produits courants comme la farine, le cacao, le sucre, les céréales, ou encore les poudres de lait ou d’additifs sont concernés.


B. Conditions d’occurrence d’une explosion

Une explosion de poussière nécessite la réunion de cinq éléments :

  1. Un combustible (poussière)
  2. Un comburant (oxygène)
  3. Une source d’inflammation
  4. Une concentration suffisante
  5. Un espace confiné

Ce qu’on appelle le pentagone de l’explosion. Supprimer un seul de ces éléments suffit à empêcher l’explosion.


C. Exemples d’accidents marquants

Des explosions ont déjà touché des sites agroalimentaires :

  • Explosion dans une minoterie liée à une gaine mal nettoyée
  • Incendie dans une tour de séchage de lait en poudre à cause d’un défaut de ventilation
  • Détonation dans une unité de production de céréales soufflées suite à l’échauffement d’un roulement

Ces événements rappellent la gravité potentielle du risque et la nécessité d’une vigilance permanente.


II. Réglementation et obligations en matière de zones ATEX


A. Le classement des zones à risque

La réglementation impose le classement des zones ATEX (atmosphères explosives), en deux catégories :

  • Zone 20 / 21 / 22 pour les poussières
  • Zone 0 / 1 / 2 pour les gaz, vapeurs

Dans l’agroalimentaire, ce sont principalement les zones 20 (risque permanent), 21 (fréquent) et 22 (occasionnel) qui s’appliquent.

Ce classement doit figurer dans un DRPCE (document relatif à la protection contre les explosions).


B. Les obligations de l’exploitant

L’entreprise doit :

  • Identifier et évaluer les zones à risque ATEX
  • Rédiger le DRPCE et le mettre à jour régulièrement
  • Utiliser des équipements conformes ATEX (moteurs, capteurs, éclairages…)
  • Former le personnel à la prévention des explosions
  • Mettre en œuvre des mesures techniques et organisationnelles pour supprimer une ou plusieurs composantes du pentagone

L’Inspection du travail peut demander à consulter ces documents à tout moment.


C. Contrôles, responsabilités et sanctions

En cas d’explosion ou de non-conformité :

  • L’employeur peut voir sa responsabilité pénale engagée
  • L’assurance peut refuser de couvrir les dommages
  • Une fermeture administrative ou une mise en demeure peut être prononcée

Une politique de prévention ATEX structurée est donc essentielle.


III. Bonnes pratiques pour maîtriser le risque explosion


A. Nettoyage et maîtrise de la poussière

Un nettoyage régulier et méthodique est la première barrière :

  • Aspiration centralisée plutôt que balayage
  • Nettoyage de toutes les zones en hauteur, conduits, moteurs
  • Dépoussiérage des installations pendant les arrêts techniques

Des protocoles stricts doivent être établis par zone.


B. Choix des équipements adaptés

Tout matériel utilisé dans une zone ATEX doit être :

  • Conforme à la directive ATEX 2014/34/UE
  • Adapté à la zone de classement (20, 21 ou 22)
  • Entretenu et contrôlé régulièrement

Exemples : moteurs antidéflagrants, sondes ATEX, éclairages spécifiques, variateurs protégés.


C. Organisation du travail et formation

Le facteur humain est central :

  • Former le personnel aux gestes à risque (décolmatage, nettoyage, maintenance)
  • Sensibiliser à l’apparition de signes précurseurs (poussière visible, échauffement anormal)
  • Désigner un référent ATEX dans chaque zone critique
  • Intégrer la prévention explosion dans le DUERP et les plans de prévention

La culture sécurité est un levier déterminant dans la maîtrise durable du risque.


Conclusion

Le risque d’explosion dans l’industrie agroalimentaire est bien réel, bien que souvent invisible. Il ne s’agit pas d’un danger spectaculaire, mais d’un risque latent, lié à la combinaison de poussières inflammables et de conditions propices. En combinant maîtrise technique, conformité réglementaire et engagement humain, les entreprises du secteur peuvent prévenir efficacement les accidents et garantir un environnement de travail sûr. Anticiper, classifier, former et nettoyer sont les piliers d’une démarche QHSE solide face au risque ATEX.


#QHSE #ATEX #Agroalimentaire #RisqueExplosion #SécuritéIndustrielle