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18/07/2025L’AIPR est-elle obligatoire pour tous les chantiers ? Analyse des cas d’application
Depuis sa mise en œuvre effective en janvier 2018, l’AIPR (Autorisation d’Intervention à Proximité des Réseaux) est devenue une pièce incontournable du puzzle réglementaire sur les chantiers français. Conçue pour renforcer la sécurité des personnes et des infrastructures, cette autorisation permet de s’assurer que les intervenants disposent des connaissances nécessaires pour travailler à proximité de réseaux enterrés ou aériens sensibles (gaz, électricité, eau, fibre optique…).

Mais derrière cette exigence de bon sens, une question demeure :
L’AIPR est-elle obligatoire sur tous les chantiers ?
La réponse, en apparence simple, demande une analyse fine des textes réglementaires, des types d’interventions, et des profils professionnels concernés.
Dans cet article, nous passons en revue les cas concrets d’application, les exceptions, et les enjeux pour les entreprises et les donneurs d’ordres.
I. Le cadre réglementaire de l’AIPR
A. Un dispositif issu de la réforme anti-endommagement
L’AIPR s’inscrit dans le prolongement de la réforme dite « anti-endommagement » portée par le décret n°2011-1241 du 5 octobre 2011 et son arrêté d’application du 22 décembre 2015.
Cette réforme a pour objectif de :
- réduire les dommages aux réseaux causés par les travaux,
- renforcer la sécurité des intervenants et des tiers,
- clarifier les responsabilités de chaque acteur : concepteur, exécutant, maître d’ouvrage, exploitant de réseaux.
B. Une obligation formalisée depuis 2018
Depuis le 1er janvier 2018, l’AIPR est obligatoire pour certains profils intervenant à proximité des réseaux. Elle se base sur la réussite à un QCM officiel, ou sur d'autres justificatifs équivalents (diplôme, certification…).
L'autorisation est délivrée par l’employeur après vérification des compétences et tient compte du rôle réel de l’intervenant sur le chantier.
II. Les cas où l’AIPR est obligatoire
A. Travaux à proximité de réseaux sensibles
L’AIPR est obligatoire dans tous les cas où les travaux :
- nécessitent une DT/DICT (Déclaration de Travaux / Déclaration d’Intention de Commencement de Travaux),
- peuvent impacter des réseaux sensibles, que ceux-ci soient enterrés ou aériens,
- engagent une responsabilité directe ou indirecte dans la conduite des travaux (manipulation d’engins, encadrement, ou conception du projet).
Exemples :
- Travaux de terrassement, forage, enfoncement de piquets, réalisation de tranchées,
- Travaux de voirie ou d’aménagement urbain,
- Pose de clôtures, abris de jardin, portails,
- Implantation de mobilier urbain ou signalétique,
- Travaux de maintenance sur infrastructures proches de réseaux (éclairage public, assainissement…).
Dans tous ces cas, la présence de l’AIPR est obligatoire pour les profils concernés.
B. Profils obligatoirement habilités
Trois profils sont visés :
1.Opérateur :
Toute personne utilisant un engin de chantier à proximité de réseaux sensibles.
(Ex. : conducteurs de pelleteuses, grutiers, foreurs…).
2.Encadrant :
Personne en charge de l’organisation ou de la supervision des travaux.
(Ex. : chef de chantier, conducteur de travaux).
3.Concepteur :
Professionnel réalisant les études ou plans en amont des travaux.
(Ex. : maître d’œuvre, géomètre, technicien de bureau d’études).
III. Les cas particuliers et exceptions
A. Travaux sans impact sur les réseaux
L’AIPR n’est pas obligatoire si les travaux :
- se déroulent dans une zone sans réseau sensible identifié,
- ne sont pas soumis à DT/DICT,
- n’impliquent aucune atteinte au sous-sol (ex. : peinture, entretien de surface…),
- sont réalisés sans engins mécaniques, et sans danger pour des réseaux aériens proches.
Exemples :
- Tonte de pelouse ou débroussaillage sans engin motorisé,
- Nettoyage de mobilier urbain,
- Remplacement de signalisation temporaire de chantier sur une zone exempte de réseau sensible.
Mais attention : en cas de doute ou d'absence de repérage, l’employeur reste responsable. Il est donc recommandé de délivrer l’AIPR même dans ces cas limites, par principe de précaution.
B. Intervenants sans manipulation d’engins
Un salarié travaillant à la main dans une zone sécurisée, sans intervention directe sur le sol (ex. : pose d’adhésifs sur panneaux), n’est pas concerné par l’AIPR — sauf s’il est encadrant ou concepteur.
En revanche, un manœuvre aidant un opérateur dans une tranchée, même sans engin, peut être considéré comme « à proximité directe » et donc concerné.
C. Travaux urgents
En cas d'urgence (fuite de gaz, canalisation rompue…), les travaux peuvent être engagés sans délai de DICT, mais les intervenants doivent toujours être habilités AIPR.
Les obligations de sécurité ne sont jamais suspendues, même dans l’urgence.
IV. Obligations pour les employeurs et maîtres d’ouvrage
A. Délivrance de l’AIPR
L’AIPR est délivrée par l’employeur après vérification des compétences. Il doit conserver les preuves :
- de réussite au QCM,
- du diplôme équivalent,
- de l’expérience avérée en lien avec les exigences réglementaires.
Sa durée de validité est de 5 ans maximum, mais peut être réduite à l’initiative de l’entreprise.
B. Contrôle et traçabilité
En cas de contrôle (inspection du travail, DREAL, maître d’ouvrage), l’entreprise doit présenter :
- les autorisations AIPR individuelles,
- la preuve de leur conformité (résultat QCM, fiche de poste…),
- la correspondance entre les tâches réellement exercées et le profil AIPR.
L’absence d’AIPR pour un intervenant concerné peut entraîner :
- une mise en demeure,
- un arrêt de chantier,
- des sanctions pénales en cas d’accident.
C. Intégration dans les marchés publics
De plus en plus de marchés publics ou appels d’offres privés exigent la preuve d’AIPR pour chaque profil impliqué. L’absence d’AIPR peut alors constituer un motif de non-conformité administrative.
V. Recommandations QHSE pour rester conforme
A. Cartographier les profils concernés
Il est conseillé de :
- dresser une liste des salariés intervenant à proximité de réseaux,
- identifier leur niveau de responsabilité (opérateur, encadrant, concepteur),
- planifier les sessions d’examen QCM nécessaires,
- formaliser un registre AIPR à jour.
B. Former en amont les nouveaux arrivants
Les nouvelles recrues ou intérimaires doivent être identifiées dès leur arrivée si leur poste nécessite une AIPR.
Il est préférable d’intégrer l’examen QCM dans le parcours d’intégration ou de formation initiale sécurité.
C. Anticiper les renouvellements
Un système de rappel automatique (Excel, outil RH ou plateforme spécialisée) permet de suivre les dates de validité et d’éviter les oublis.
Anticiper les renouvellements 3 à 6 mois avant l’échéance est une bonne pratique.
Conclusion
Non, l’AIPR n’est pas obligatoire sur absolument tous les chantiers, mais elle l’est dès qu’il existe un risque d’endommagement de réseau sensible ou une responsabilité associée à une intervention en zone réglementée.
Ce n’est pas une contrainte supplémentaire : c’est une exigence de bon sens, fondée sur le retour d’expérience terrain.
En tant qu’employeur, donneur d’ordre, ou encadrant, il est essentiel de connaître précisément les cas d’application, de mettre en place une organisation claire, et de maintenir la conformité réglementaire pour protéger à la fois les équipes, les ouvrages, et l’activité.
Et vous, votre politique AIPR est-elle pleinement intégrée à votre stratégie de prévention ?
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