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21/05/2025

Conduite à tenir en cas de déversement de produit chimique sur le tarmac

Le tarmac d’un aéroport est un environnement hautement sensible. Entre circulation d’avions, véhicules spécialisés, ravitaillement, opérations de maintenance et transfert de marchandises, tout incident peut rapidement avoir des conséquences critiques. Un déversement de produit chimique, même de faible volume, représente un risque important pour la sécurité des personnes, la préservation de l’environnement et la continuité des opérations.

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Dans ce contexte, une conduite à tenir précise, formalisée et régulièrement entraînée est indispensable. Elle doit allier réactivité, coordination inter-services, maîtrise des risques et traçabilité.

Cet article détaille les étapes essentielles à respecter lors d’un déversement de produit chimique sur le tarmac, en s’appuyant sur les exigences réglementaires et les bonnes pratiques QHSE du secteur aéronautique.


I. Identifier les risques associés aux produits chimiques en zone aéroportuaire


A. Typologie des produits chimiques concernés


Les produits susceptibles d’être déversés sur le tarmac incluent :

  • carburants d’aviation (JET A-1, AVGAS),
  • huiles hydrauliques et lubrifiants,
  • dégivrants (formulations à base de glycol),
  • agents de nettoyage et solvants industriels,
  • produits biocides ou désinfectants (notamment pour les cales ou matériels).

Chaque produit présente des caractéristiques propres : inflammabilité, toxicité, corrosivité, réactivité, etc.


B. Risques humains, environnementaux et opérationnels


Un déversement peut entraîner :

  • des brûlures, irritations, intoxications pour le personnel,
  • une pollution du sol, des réseaux d’eau pluviale ou des nappes phréatiques,
  • une perturbation du trafic aérien (si la zone est neutralisée),
  • une réputation entachée en cas de mauvaise gestion ou de communication défaillante.

Les risques doivent être analysés à l’avance, intégrés au DUERP, et faire l’objet de scénarios d’exercice d’urgence.


II. Réagir immédiatement : la conduite à tenir opérationnelle


A. Sécuriser la zone


La première action consiste à protéger les personnes et isoler le danger :

  • interrompre toute activité dans la zone contaminée,
  • établir un périmètre de sécurité avec balisage clair,
  • ventiler ou évacuer la zone si le produit est volatile ou irritant,
  • empêcher le ruissellement vers les caniveaux ou bouches d’évacuation.

Si nécessaire, fermer temporairement une voie de circulation aérienne ou une aire de trafic.


B. Alerter les services compétents


Une alerte rapide est essentielle :

  • prévenir immédiatement le PC sécurité aéroportuaire,
  • informer le service QHSE,
  • déclencher l’intervention des secours internes (pompiers d’aéroport, équipes HAZMAT le cas échéant),
  • contacter les autorités compétentes (DGAC, inspection ICPE, préfecture en cas de pollution).

L’opérateur présent doit fournir :

  • type de produit concerné (étiquette, pictogrammes, code UN),
  • quantité approximative, étendue du déversement,
  • éventuelle exposition humaine ou matérielle.


C. Contenir le déversement


L’objectif est de limiter la propagation :

  • utilisation de bacs de rétention, barrages absorbants ou produits neutralisants,
  • colmatage de la fuite si la source est identifiée (réservoir, flexible, bidon…),
  • canalisation vers une zone sécurisée si possible.

Ces gestes doivent être réalisés uniquement par du personnel formé et équipé, en fonction des FDS (fiches de données de sécurité).


III. Nettoyer, analyser et déclarer l’incident


A. Opérations de nettoyage et de dépollution


Le nettoyage dépend de la nature du produit :

  • pour les hydrocarbures : absorbants hydrophobes, neutralisants, produits biodégradables,
  • pour les solvants ou produits corrosifs : rinçage contrôlé et collecte, parfois aspiration par pompes spécialisées,
  • élimination des déchets dans des contenants homologués, étiquetés et orientés vers des filières de traitement agréées.

Il est indispensable de contrôler le niveau de pollution résiduelle : prélèvements sur surface, analyses sur effluents si ruissellement.


B. Retour d’information et déclaration


L’incident doit être :

  • consigné dans un registre d’événements QHSE,
  • déclaré à la préfecture et/ou à l’Inspection des installations classées (ICPE) en cas d’impact environnemental,
  • enregistré comme incident environnemental dans le cadre ISO 14001 si applicable,
  • analyser a posteriori (REX) pour éviter la répétition.

Un rapport doit préciser :

  • la chronologie des faits,
  • les produits impliqués,
  • les actions entreprises,
  • les recommandations d’amélioration.


C. Communication et traçabilité


La communication doit être :

  • rapide, factuelle et transparente auprès des acteurs internes (direction, syndicats, services techniques),
  • maîtrisée en externe (si incident visible, présence de médias ou passagers…).

L’objectif est de ne pas générer d’inquiétude disproportionnée, tout en démontrant la maîtrise du risque.


IV. Préparer et prévenir pour limiter les conséquences


A. Dispositifs de prévention permanents


Un site aéroportuaire doit disposer :

  • de kits de déversement accessibles sur chaque zone sensible (aires de carburant, logistique, maintenance),
  • de plans de confinement et de fiches d’intervention actualisées,
  • de canalisations protégées et vannes de coupure rapide sur les réseaux sensibles.

Les zones de stockage doivent respecter les règles ATEX, être équipées de bacs de rétention et dotées d’une signalétique claire.


B. Formation des équipes


Chaque acteur du tarmac (agents, techniciens, sous-traitants) doit :

  • connaître les risques liés aux produits manipulés,
  • être formé à la lecture des étiquettes de danger et des FDS,
  • savoir utiliser les kits d’intervention d’urgence,
  • participer régulièrement à des exercices de simulation de déversement.

Un livret d’accueil sécurité ou une capsule vidéo interne peut renforcer ces apprentissages.


C. Coordination avec les services d’urgence


Les exercices doivent impliquer :

  • pompiers d’aéroport, services médicaux,
  • cellule QHSE, autorités locales (DDPP, SDIS),
  • personnel de piste et de maintenance.

La réactivité collective est le seul moyen de limiter l’impact d’un déversement chimique.


Conclusion


Un déversement de produit chimique sur le tarmac est un événement à risque élevé mais maîtrisable, à condition que les bons réflexes soient connus, que les outils soient disponibles, et que l’organisation soit testée régulièrement.


La vraie question est donc : votre site est-il simplement équipé… ou réellement prêt à intervenir en cas de déversement ?


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